La réaction en chaîne
D’un noyau individuel à une action en masse …
La fission nucléaire a beau dégager beaucoup d’énergie, elle concerne de minuscules noyaux atomiques. Si elle se limitait à celle de quelques noyaux d’uranium-235 ou plutonium_239 l’énergie libérée resterait encore très petite. Par contre, si la réaction concerne un très grand nombre de noyaux, c’est à notre échelle que se manifestera ce grand dégagement d’énergie.
C’est le phénomène de réaction en chaîne qui est utilisé dans les réacteurs et les armes nucléaires pour générer un grand nombre de fissions. Dans un réacteur la propagation des fissions se fait d’une manière contrôlée, dans un arme nucléaire d’une façon incontrôlée, explosive.
Deux à trois neutrons accompagnent en moyenne les produits de fission. Si un de ces neutrons secondaires est absorbé par un noyau fissile, il peut y déclencher une seconde fission, source de nouveaux neutrons. C’est le principe de la réaction en chaîne.
Le plutonium-239 est le noyau qui produit le plus de neutrons secondaires : 2,91 en moyenne par fission, 2,30 par capture. L’uranium-235 en produit 2,47 et l’uranium-233 2,55. Le nombre de neutrons disponibles pour de nouvelles fissions dépend de l’abondance des noyaux fissiles et des pertes dues aux neutrons capturés sans produire de fission et ceux qui quittent le cœur du réacteur ou sont piégés par d’autres noyaux.
Quand le nombre de neutrons « relayeurs » devient supérieur à un, une réaction en chaîne se développe d’une manière explosive. La fission ne concerne plus des noyaux individuels mais une fraction importante de la matière fissile. Les énergies mises en jeu dans les phénomènes nucléaires étant des dizaines de millions de fois celles des phénomènes chimiques, l’explosion dégage une énergie énorme à l’échelle humaine.
Il faut donc maîtriser la capture des neutrons pour contrôler « à petit feu » la réaction dans les réacteurs nucléaires. Le fonctionnement d’un réacteur utilisant l’uranium naturel est délicat, car ce dernier ne contient qu’une faible proportion – 0,70 % – d’uranium-235 fissile. On a généralement recours à des procédés de séparation isotopique pour enrichir la proportion d’uranium-235 de 0,70 % à 3,5 %. Ceci permet de l’utiliser dans des réacteurs à eau pressurisée qui sont les plus répandus à l’heure actuelle.
Ces derniers fonctionnent avec un uranium enrichi à 3,5 % en U-235 fissile. Pour que la réaction en chaîne puisse être entretenue, il faut éviter que la perte de neutrons soit importante dans les 97 % d’uranium non fissile restants et les matériaux constituant ou entourant le cœur du réacteur.
La probabilité de fission varie en effet beaucoup avec l’énergie du neutron capturé. Pour l’uranium-235, elle est maximale avec des neutrons de très basse énergie, appelés neutrons thermiques. Il faut ralentir les neutrons le plus vite possible, pour éviter qu’ils soient capturés en route par d’autres noyaux et donc perdus. On cherche à les ralentir jusqu’à une très faible énergie, pour que la proportion des neutrons qui fissionnent l’uranium-235 soit la plus favorable. A cet effet, les matières fissiles sont mises en présence d’un milieu ralentisseur (eau ou graphite), appelé « modérateur ».
Grâce au modérateur, on a la possibilité de disposer par fission d’un peu plus d’un neutron susceptible de donner une seconde fission. Afin d’éviter que la réaction ne diverge d’une manière explosive, le réacteur est conçu pour que la « criticité » (proportion de neutrons entretenant la réaction en chaîne) reste exactement égale à 1. Par exemple les réacteurs à eau pressurisée REP sont conçus pour qu’une excursion de la criticité au dessus de la valeur 1, qui pourrait prendre un tour dangereux, soit immédiatement et naturellement corrigée.
Voir aussi :
Réacteurs nucléaires
Fonctionnement des REP
Contrôle des réacteurs
Modérateurs de neutrons
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